La France ne peut se passer d'exploiter les terres rares de son territoire
Lun 09/06/2025 — Ou céder au change chinois ?
Ce n'est pas un fait nouveau, c'est la suite d'une politique qui a débuté il y a plus de 30 ans. Les chinois ont massivement investi dans l'exploitation minière de leurs ressources en terres rares (néodyme, praséodyme, dysprosium, l'appellation regroupe 17 éléments chimiques du tableau périodique), ainsi que dans leur raffinage. Les chinois ont même fait du dumping pendant un temps, ce qui avait conduit à arrêter l'exploitation d'une mine aux Etats-Unis. Selon l'agence internationale de l'énergie, ils contrôlent aujourd'hui quelques 60 % de la production et 90 % du raffinage. Et voilà qu'ils ont mis en place des licences d'exportation. C'est dire que non seulement, ils peuvent fixer les prix, mais qu'ils peuvent aussi choisir à qui les vendre. Ou ne pas les vendre. Mais parce qu'ils sont chinois et malins, ils sont toujours prêts à négocier. Selon leurs termes...Le principal sujet de discussion est autour des voitures électriques chinoises, pour lesquelles Bruxelles a constaté que leur production avait été subventionnée par l'état. Pour corriger cette infraction aux règles de la libre concurrence, le régulateur européen a imposé une taxe supplémentaire à ces produits. L'Europe pourra t-elle la maintenir tout en garantissant aux industriels européens que leurs besoins en terres rares provenant de Chine seront satisfaits ?
Heureusement pour l'industrie automobile, il est possible de faire des moteurs électriques sans recourir à aucun métal des terres rares. Ce sont les moteurs sans aimant, avec excitation externe. Renault et BMW savent en faire (illustration : le moteur Renault E7A). Il est donc possible, même si cela prendra du temps pour que tous les constructeurs s'adaptent, de réduire la consommation de terres rares des industriels européens. Surtout que si on a aussi besoin de terres rares dans beaucoup de produits électroniques, ce sont des produits pour lesquels l'industrie européenne n'est plus guère compétitive. Et pour aller plus loin, la France, et l'Europe, ne pourront se passer longtemps d'exploiter les ressources de leurs sols.Il y a en effet des terres rares en Bretagne et dans le Massif Central. C'est toujours le principe du pollueur-payeur. Si on fait le choix de la mobilité électrique, il faut accepter les mines de lithium, la pollution qu'elles engendrent, comme celles des autres minerais nécessaires à l'électronique de pointe. C'est la même chose que pour le nucléaire. Si on est partisan de cette énergie, il faut accepter les déchets de cette industrie. C'est de la lacheté que de vouloir qu'elle soit chez les autres, le plus loin possible. L'honnêteté exige au contraire que la pollution soit au plus près du consommateur.
Laurent J. Masson
Rubrique(s) et mot(s)-clé : hors-constructeur ; ecologie