Profiter de tout MoteurNature

Twitter

Youtube


MoteurNature
Toute l'actualité de la voiture verte depuis 2002.

22 années d'expériences pour vous informer.

Un second malus au poids ?

Mer 09/10/2019   —   Le pouvoir est ennemi des automobilistes, mais aussi du progrès ?
Citroen 2CVL'assemblée nationale discute en ce moment du futur système de bonus-malus qui doit entrer en vigueur au 1er janvier et, en commission, un amendement a été adopté pour ajouter un second malus au système en place. Ce serait un système uniquement punitif, puisqu'il ne s'accompagnerait pas d'un second bonus. L'idée est simple, elle est de taxer les autos au poids. Plus une auto est lourde, plus son acquéreur devrait payer un malus élevé, jusqu'à 10 000 € (!), et cela en sus du malus traditionnel (accru jusqu'à 12 500 €). A la base de l'idée, il y a le fait indiscutable que les voitures sont de plus en plus lourdes. Il importe pour commencer de chercher à comprendre pourquoi.

Petit récapitulatif de ce qui augmente le poids d'une voiture.

La sécurité

Si les derniers modèles sont beaucoup plus sûrs que les anciens, c'est en grande partie dû à leurs meilleurs équipements. Les airbags par exemple, certaines voitures en ont plus de 10, ne sont que des coussins d'air, mais certaines voitures en ont plus de 10, et avec leurs organes de déploiement automatiques, ils ajoutent une masse non négligeable. Tous les systèmes électroniques ensuite, contrôle de maintien de la trajectoire, anti-blocage des freins, contrôle de la traction, assistance au maintien dans la file, freinage d'urgence automatique, si on enlève tous les composants de ces systèmes sur une voiture moyenne, il y a de quoi remplir tout le coffre. Et bien sûr, il y a le chassis. Si on veut la coque la plus rigide qui soit, et la plus apte à résister aux chocs pour préserver la vie de ses occupants... Il faut faire plus lourd que la carrosserie d'une vielle 2CV.

La technologie

Un carburateur avec une pompe à essence mécanique font moins de 10 kg. Mais aujourd'hui, on a des systèmes d'injection à haute pression, avec pompe haute pression, et c'est bien plus lourd que l'ancienne technologie. Il y a ensuite bien sûr tout l'attiral d'un système hybride. Même sur une hybride light, il faut ajouter les masses d'un moteur électrique, de son mécanisme de liaison à la transmission, et de la batterie qui va l'alimenter. Sur une hybride non rechargeable de type Toyota, tout cela pèse plus de 100 kg.

Le pouvoir d'achat

On aura souvent entendu que ce gouvernement est le gouvernement des riches, et c'est là très vrai que réduire la masse d'une automobile est un sport de riches. Le moins cher pour construire la coque d'une voiture est, et restera probablement toujours le fer (ou un alliage très majoritairement composé de fer). L'aluminium est plus léger, mais il est plus cher. Le magnésium est encore plus léger, mais il est encore plus cher. Et les fibres de carbone encore plus, sans évoquer la difficulté de leur recyclage. Enfin si toutes les voitures essence et diesel ont encore une batterie plomb-acide plutôt qu'une lithium-ion dernier cri bien plus légère, c'est toujours pour une question d'argent.

Le confort

Il y a encore quelques maisons très sombres en France, parce qu'elles ont peu de fenêtres. Cela date du temps où elles étaient taxées, alors on en faisait le moins possible. Aujourd'hui, beaucoup de voitures ont des toits panoramiques en verre, ou des toits ouvrants, tout cela est bien plus lourd qu'une plaque de tôle. Et on n'évoquera pas les cabriolets, qui nécessitent des renforts sur le chassis... Et les vitres latérales ? Pour les ouvrir, la plupart des autos ont des petits moteurs électriques, mais une manivelle est plus légère. Il faudra donc revoir la liste des équipements pour supprimer vitres et sièges électriques, remplacer les vitres latérales arrières par des éléments en tôle, comme sur les utilitaires, sans oublier ce mal absolu qu'est l'air conditionné, puisqu'en plus d'ajouter du poids, il consomme de l'énergie. Exit donc tous les accessoires de confort.

La dépollution

Avec les normes antipollution de plus en plus sévères, les lignes d'échappement sont devenu des monstruosités, avec plusieurs catalyseurs et silencieux. Le filtre à particules sur tous les diesels, et maintenant aussi sur toutes les essences. Si on roulait tous en échappement libre, quel gain de poids ! Un collecteur sur la culasse, un bout de tube pour donner une sortie latérale, et le tour est joué. Le premier ministre devrait exiger ce changement au plus vite !

Conclusion

Il faut être sérieux, et ne pas s'étonner. On ne pourrait plus homologuer une Citroën 2 CV aujourd'hui. L'accroissement de la masse des autos n'est que le reflet de la complexité croissante de la société. Il devient de plus en plus difficile de concevoir une voiture, mais aussi de gérer une entreprise, d'embaucher et de licencier un employé, de louer un appartement, ou même d'organiser une sortie scolaire. Les constructeurs sont très conscients du poids de leurs produits, et ils font ce qu'ils peuvent pour le réduire dans les limites de l'acceptable, c'est-à-dire en continuant à fabriquer des voitures que les gens aient envie d'acheter. Les promoteurs de ce projet savent-ils qu'une Renault Clio, dans sa version la plus ordinaire, moteur sans turbo, avec des enjoliveurs en plastique et les vitres arrières à manivelle, fait déjà plus de 1100 kg ? Une Clio. Pas une grosse voiture, ni une voiture de luxe.

En voulant taxer la masse des véhicules, le législateur se trompe une nouvelle fois, parce qu'il sort de son obligation de neutralité. On le voit déjà les taxes sur les hydrocarbures. L'essence, le gazole, le GPL, le gazole non routier, le fioul domestique, si l'état était impartial, tous ces hydrocarbures fossiles seraient taxés au même taux. Pour la problématique du jour, si l'état est impartial, il ne doit taxer que les émissions, et ne pas s'occuper des choix technologiques ou des caractéristiques des véhicules émetteurs. Cet amendement adopté en commission n'a heureusement pas valeur de loi. On espère qu'il n'atteindra jamais ce stade.


Laurent J. Masson



Rubrique(s) et mot(s)-clé : hors-constructeur ; bonus-malus-prime-taxe ; ecologie